Cameroun : le costume de dirigeant trop lourd pour Samuel Eto’o ?
L’ancien attaquant de l’Inter de Milan aujourd'hui président de la Fédération camerounaise de football, est plongé dans un tourbillon de conflits notamment avec le gouvernement et son club formateur la Kadji Sport Academy.
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La légende Samuel Eto'o a troqué son maillot de footballeur à celui de dirigeant le 11 décembre 2021. En remportant haut la main l’élection du président de la Fédération camerounaise de football (43 voix sur 74 possibles). Le projet de modernisation du football camerounais et la popularité de l'ex attaquant accrochent les acteurs locaux, le public renoue avec le championnat et prend d'assaut les gradins des stades.
Contre l’avis de Narcisse Nouvelle Kombi, le ministre camerounais des Sports, Samuel Eto'o, l'homme aux trois Ligues européennes des Champions dont celle de la saison 2009 - 2010 avec Inter de Milan, obtient l'accord du président de la République, Paul Biya, de nationaliser le banc de touche de l’équipe nationale senior, propriété exclusive de l’État du Cameroun. Le Portugais Antonio Conceiçao est remplacé par l’ex capitaine Rigobert Song. L’ancien défenseur de Salernitana (1998 à 1999) qualifie le Cameroun pour la Coupe du monde 2022 au Qatar (élimination au premier tour avec 4 points), et pour la Coupe d'Afrique 2023 (élimination en huitième de finale). Après la Coupe d'Afrique, le gouvernement et la fédération sont en accord sur la nécessité de mettre un terme à la collaboration avec Rigobert Song et son staff, et de retourner en Europe chercher son successeur. Marc Brys, coach Belge, nom peu ronflant dans le monde du foot, est retenu par le ministre camerounais des Sports, avec approbation du président de la République. Brys se voit adjoindre également des collaborateurs. Non impliqué dans la désignation du staff technique, la fédération, instance faîtière du football au Cameroun rejette les nominations du gouvernement. Son président, Samuel Eto'o, visait en effet "mieux". Trois propositions dont celle de l'ancien défenseur de la Squadra Azzurra, Fabio Cannavaro, aujourd'hui entraîneur de football avaient été soumises au ministre des Sports qui n'en a pas donné suite.
Eto'o s’oppose au choix porté sur Marc Brys. La témérité du gouvernement l’amène à fléchir partiellement. L’ancien pensionnaire de la Sampdoria (2015) valide le coach Belge et trois de ses collaborateurs, et rejette le reste. Avec l’onction du Comité exécutif de la fédération, il nomme d'autres techniciens. Ce que désapprouve à son tour le ministre des Sports. Au nom d'une convention signée en 2015, le ministère des Sports a la possibilité autant que la fédération, de nommer un staff technique pour l'équipe nationale. Le ministre Narcisse Mouelle insiste sur la nécessité de laisser travailler le staff technique nommé avec l'accord du chef de l'État Paul Biya. La Fédération ne l'entend pas de cette oreille et fait jouer les matchs des troisième et quatrième journées des éliminatoires de la Coupe du monde 2026 avec une partie du staff qu’elle a nommée. Le Cameroun bat le Cabo - Verde 4 - 1 et fait nul avec l’Angola 1 - 1 pour consolider sa place de leader de la poule D.
L'acte de Samuel Eto'o est néanmoins perçu comme de la rébellion. Dans les cercles du pouvoir, beaucoup n’hésitent pas à le présenter comme un potentiel adversaire politique au président de la République. Le quadruple ballon d’or africain soutenu en sourdine par de nombreux caciques du pouvoir et par une frange de la population, est présenté comme un disciple de Georges Weah, l'ancien ballon d’or UEFA 1995, devenu président de la République du Liberia. Les pressions politiques s'exercent sur Samuel Eto'o qui se sent obligé de réagir le 14 juin 2024, se fendant d'un démenti. Eto'o dit n'avoir jamais eu d'ambition d'être chef de l'État.
L’affaire Kadji Sport…
L'affaire de l'entraîneur n'a pas fini de faire des gorges chaudes dans l'opinion qu'une autre histoire scabreuse éclabousse la Fecafoot de Samuel Eto'o. Une décision fédérale relègue son club formateur Kadji Sport Academy de deux divisions inférieures et suspend son président, Gilbert Kadji, pour cinq ans. Le club crie à la persécution. Face au refus de la fédération de lui délivrer la cinquantaine de licences de footballeurs commandées depuis deux ans, le club de troisième division déclare n’avoir pas été en mesure de poursuivre le championnat, d'où le forfait declaré qui lui faut la lourde peine. Son président Gilbert Kadji, autrefois connu comme proche de Samuel Eto'o, affirme face à la presse que ses nombreux recours, introduit pour solliciter la production des licences de ses joueurs sont restés lettre morte. Au point de saisir la Confédération africaine de football (équivalent de l’UEFA) qui, elle également, n'aurait pas reçu de réponse de la fédération. Dans un communiqué publié ce 14 juin 2024 sur sa page Facebook, Celle-ci déclaré avoir informé l'académie créée en 1996, des manquements constatées dans sa demande de licences.
Clarifications de la fédération
Kadji Sport Academy se dit prêt à ester la fédération devant le Tribunal arbitral du Sport à Lausanne en Suisse. Objectif, faire annuler les sanctions, obtenir des licences et dans la foulée recevoir le Certificat de transfert international du joueur Ronny Mimb prêt de s'engager avec l’Olympique de Marseille en France.
Cet imbroglio, énième conflit mettant en scène la Fédération camerounaise de football, ne laisse lui aussi présager son issue.
Djimi Amadou Ahidjo
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